AVERTISSEMENT

Je tiens à préciser pour les personnes qui auraient du mal à comprendre la démarche d’un blog (flatter l’égo démesuré de l’auteur, partager ses névroses, faire pleurer dans les chaumières, passer ses nerfs, raconter des conneries, informer un peu, se marrer beaucoup, toussa), que tout ce qui est écrit ici – non seulement n’engage que moi – mais surtout, que tout ce qui y est raconté est bien évidemment purement fictif. Par là j’entends que ces récits, satires, pamphlets, anecdotes (lorsqu’ils ne sont pas tirés d’ouvrages extérieurs) sont inspirés de faits réels mais sont, comme vous l’aurez tous compris, racontés à travers le filtre d’une imagination débordante et d’un esprit, je m’en excuse, légèrement névrosé.

dimanche 23 octobre 2011

Tu pousses le bouchon trop loin Maurice !!


Ce billet fait suite à quelques interrogations que j'ai eu après une journée de cours bien pourrie. 

Pourrie parce que premièrement je l'ai passée sous la flotte et que j'aime pas trop ça, et deuxièmement parce que j'ai eu l'impression de passer ma journée à hurler sur mes élèves... 

Pas très réjouissant, et puis ça laisse un goût plutôt amer dans la bouche.

Bon, entendons nous bien, je dis hurler, parce que de toutes façons, à moins d'être équipé High Tech et d'avoir un micro, un moniteur passe son temps à crier au milieu de la carrière s'il veut que ses élèves réussissent à percevoir un minimum de consignes et d'explications. 

Et là je ne vous parle que des jours de beau temps, quand il n'y a pas de vent, de tracteur, d'individu mal intentionné qui décide de passer le débroussailleur sur le pourtour de la carrière ! 

Imaginez vous par jour de grand vent, il faut calculer à quel moment le cavalier va passer dans le sens du vent pour que le son qui sort de votre bouche atteigne ses oreilles, il faut ensuite essayer de synthétiser au mieux la phrase que l'on veut lui dire, et le pire, c'est qu'au moment où vous allez lui donner des conseils ou le reprendre sur sa position, ce que vous direz n'aura plus rien à voir avec ce qu'il est à présent en train de faire... Pour peu qu'en plus le cavalier soit un peu dur d'oreille ou complètement ailleurs, c'est comme si vous parliez dans le vide.

Et le must, le pire du pire, c'est l'orage de grêle qui dure une heure, juste l'heure de cours... Alors quand vous avez de la chance vous êtes dans un manège, enfin, de la chance c'est vite dit ; imaginez vous en train de parler alors que toute la fanfare du 14 juillet défile sur le toit en tôle ondulée du manège. 

Je vous décris la sensation : vous ouvrez la bouche, vous articulez vos mots de la voix la plus puissante possible et... même vos propres oreilles n'entendent pas le moindre son sortir de votre bouche. Je vous promets que c'est une sensation vraiment, mais vraiment très désagréable.

Bon, voilà, ça c'était pour planter le décor, mais ça n'a rien à voir car ce jour là, à part la pluie, ça allait encore. Niveau acoustique, c'était gérable.

Je me suis rendu compte que ma pédagogie, ou du moins ma tentative de pédagogie, suivait une courbe très étrange lorsque j'arrivais dans un nouvel endroit ou lorsque j'avais de nouveaux élèves.

Oui, c'est ça, des élèves tous beaux/tous neufs, dans un endroit tout beau (ou pas), tout neuf (jamais vu encore mais j'aimerais bien !). Vous savez, la sensation de tout recommencer sur de bonnes bases, quand tout est encore idéalisé, qu'on se dit que là, c'est pas comme là où on était avant ; qu'ici au moins les chevaux ne sont pas dans des box sales (ils sont au pré où il n'y a pas d'herbe ni d'abri mais on leur donne du foin quand on n'oublie pas, c'est mieux non ?), qu'on a du matériel qui tient la route (bon, à part la sangle que ça fait 20 fois qu'on me dit qu'on va en racheter une mais que c'est toujours pas fait...), qu'on a un vrai bureau rien qu'à soi (ça serait possible d'avoir un ordi avec ? Non ? Bon tant pis...) et toussa toussa

Donc voilà, quand je fais mes premiers cours avec mes nouveaux élèves tousbeaux/tousneufs tout se passe extraordinairement bien, ils écoutent, sont super attentifs, se concentrent et les cours sont géniaux. Ils sont souvent super contents parce qu'ils ont l'impression d'avoir appris plein de nouveaux trucs que personne ne leur avait jamais dit (bon, j'espère que c'est pas qu'une impression hein), mais généralement on leur avait déjà dit, mais pas comme ça, et comme ça c'est mieux. Ben oui, forcément que c'est mieux, puisque c'est moi qui l'ait fait... Non ?

Fin voilà, donc les premières semaines c'est la lune de miel, tout est magnifique, j'ai les meilleurs élèves du monde, ils sont super forts, ils arrivent à faire tous les exercices, même quand ils sont un petit peu compliqués pour leur niveau et tout et tout. Mais bon, ça c'est normal puisque je suis une super monitrice... Non ?

Et puis un jour... Patatra, tout s'écroule, fini la lune de miel, fini les supers élèves attentifs, fini les exercices réussis en fin de séance même si c'était super difficile... Mes supers élèves tousbeaux/tousneufs se sont transformés en élèves normaux, plustoutàfaitbeaux/plustoutàfaitneufs et je me rends compte qu'ils n'écoutent pas si bien que ça, ou pas tout le temps, et qu'il n'appliquent pas si bien que ça les consignes pourtant claires et précises que je leur donne. Du coup je répète au moins un millier de fois la même chose avec des mots différents pour voir si ça viendrait pas d'un défaut de compréhension, je leur demande ce qu'ils n'ont pas compris...
Réponse : "Si j'ai compris..."
Alors pourquoi ils ne font pas ce que je leur demande... 
Réponse : "J'sais pas..."

Et là ça commence généralement à m'énerver parce que j'ai épuisé toutes les solutions pédagogiques humainement utilisables au milieu d'une carrière : explications, mimes, dessin dans le sable, ré-explication avec d'autres mots, démocratie participative (qui m'explique ce qu'il faut faire et comment ?...), et tout le reste ! 

Donc, je hurle... Attention, je ne hurle pas pour les insulter et leur dire que ce ne sont que des bons à rien qui n'ont rien à faire là et qu'ils feraient mieux d'aller enfiler des perles comme certains peuvent le faire d'une manière assez récurrente au milieu de leur carrière. Non, moi je hurle mes consignes, en fait je les crie plus fort, parce que j'ai l'impression que quand je ne fais que crier le son n'atteint pas leur cerveau, il doit s'arrêter avant, entre le tympan et le premier neurone ou un truc comme ça...

Mais pourquoi tant de haine ? Ça devrait pas m'arriver, je sais que ce que je demande n'est pas trop compliqué, enfin je crois... Non ?

Voilà, vous venez "d'assister" à la séance fatidique, celle qui nous permet à moi et à mes élèves d'atteindre de point 0 de leur apprentissage. Je m'explique.

Cette séance à deux effets.

Le premier est que mes élèves se rendent compte que j'ai, tout comme leurs parents et tout être humain normalement constitué, une patience qui a ses limites et que même si ces limites sont difficiles à atteindre vraiment, il faudrait voir à ne pas pousser le bouchon trop loin Maurice. 

Le second effet est plus subtil, je me rends compte que mes élèves ne sont pas parfaits, que parfois ils ne sont pas concentrés, que parfois ils ne sont pas doués, que parfois ils n'y arrivent pas et puis voilà, c'est comme ça et c'est pas la fin du monde.

Je me rends donc compte de leurs limites comme ils viennent de se rendre compte des miennes, ce n'est pas parce qu'ils ont magnifiquement réussi un exercice super difficile la dernière fois qu'ils vont toujours réussir les exercices super difficiles, surtout si je pars du principe que ce qu'ils ont réussi une fois est acquis. Grossière erreur !! 

Et oui, tout comme dans l'éducation et le dressage du cheval, on ne part jamais du point culminant de la séance précédente, beaucoup trop présomptueux mademoiselle voyons ! On repars toujours de la base, des exercice qui sont maîtrisés, on répète les gammes et petit à petit on y ajoute des nouveautés, par petite touche, et surtout on ne pourri pas le moral de ses élèves, qu'ils soient humains ou équins, en leur demandant des exercices qui leur demandent toutes leurs ressources physiques et mentales sur plusieurs séances d'affilé, on les laisse souffler un peu que diable !

Et voilà ma courbe pédagogique qui après une monté en flèche fulgurante suivie d'une chute aussi abrupte que violente, se remet lentement à gravir les échelons de l'apprentissage, pas à pas. Nous sommes mes élèves et moi sur la même longueur d'onde, il n'ont pas un moniteur parfait bien qu'ils l'adorent (oui oui, j'vous jure c'est vrai) et je n'ai pas des élèves parfaits bien que je les apprécie beaucoup également, chacun avec leurs petits défauts, leur caractère timide, curieux ou bien râleur (vive les ados...)

J'imagine que c'est ça, le "lâcher prise" et je dois dire que la sérénité qui s'ensuit est assez reposante...


1 commentaire:

  1. Je me suis toujours demandé si les monos avaient bien conscience de la difficulté qu'ont les élèves à bien faire l'exercice demandé... Ce n'est pas toujours un manque de bonne volonté, mais aussi et surtout un manque de compétence. Les monos ont mis combien d'années pour avoir le niveau qu'ils ont ? Et nous, nous sommes sur un cheval depuis combien d'années ? Allons, un peu de tolérance, mamzelle la mono. Et pour la plupart, les élèves ne montent qu'une seule fois par semaine, ce qui n'a rien à voir avec toutes les heures quotidiennes que s'est farcies notre mono préférée.... ;-))

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