AVERTISSEMENT

Je tiens à préciser pour les personnes qui auraient du mal à comprendre la démarche d’un blog (flatter l’égo démesuré de l’auteur, partager ses névroses, faire pleurer dans les chaumières, passer ses nerfs, raconter des conneries, informer un peu, se marrer beaucoup, toussa), que tout ce qui est écrit ici – non seulement n’engage que moi – mais surtout, que tout ce qui y est raconté est bien évidemment purement fictif. Par là j’entends que ces récits, satires, pamphlets, anecdotes (lorsqu’ils ne sont pas tirés d’ouvrages extérieurs) sont inspirés de faits réels mais sont, comme vous l’aurez tous compris, racontés à travers le filtre d’une imagination débordante et d’un esprit, je m’en excuse, légèrement névrosé.

vendredi 29 juin 2012

Le bel étalon noir...




Je continue ma série consacrée à quelques uns des chevaux que j'ai au travail avec mon magnifique, mais très très super chiant entier noir. C'est une race des pays de l'est, assez rare par chez nous d'ailleurs, mais il a tout à fait l'allure d'un cheval de sport lambda quand on le voit comme ça. Vous l'aurez deviné... il est noir, avec une toute petite marque en tête sur le front et aucune balzane. Sa tête est particulière car très osseuse, j'imagine que c'est un vrai casse tête à tondre (c'est le cas de le dire) surtout autour des yeux. Il doit toiser aux environs d'1,70m et il est lui aussi un peu gras, il faut bien se l'avouer... Il est assez ramassé comme ça, mais son dos est tout de même un peu long, des aplombs corrects et une encolure énorme avec une force phénoménale.

Niveau caractère : ben il est chiant... C'est un entier quoi, mais pas l'entier dangereux qui saute sur tout ce qui bouge et tape/boxe tout ce qui passe, pas du tout ce genre. Lui c'est plutôt le genre pot de colle, qui veut tout savoir, tout voir et tout toucher... Quand on rentre dans le box, le cheval normal, il se pousse. Ben lui non, lui il se pousse pas, il reste là, devant, il faut qu'il sache ce qu'il se passe devant la porte des fois qu'il y aurait le scoop du siècle juste là maintenant, nan nan, pas question, on sait jamais !

Donc voilà, déjà, faut réussir à rentrer, donc il faut le pousser. Alors au début, il fallait vraiment le pousser, de toutes ses forces, parce que monsieur, il résistait, il voulait pas ! Maintenant ça va un peu mieux parce que moi, les chevaux irrespectueux ça m'énerve et je trouve ça dangereux, du coup il a appris à répondre à la "pression" et à la "suggestion" comme disent les éthologues, ça fait quand même des vacances. Et puis une fois dans le box et ben c'est pareil, il ne veut que aller devant la porte, mais comme il est entier, on se dit que si par malheur il voulait aussi sortir, on serait pas dans la merde. Du coup je passe mon temps à lui dire de reculer, c'est un jeu... Je le fais reculer d'un pas, il ravance d'un demi pas et demi, je le fais reculer de deux, il ravance de 3 ou 4 mini pas, comme ça, l'air de rien... L'innocence incarnée ce cheval, et puis il fait l'offusqué quand je me fâche en plus ! 

Ensuite il veut tout savoir, il faut qu'il sente la brosse, il faut qu'il regarde où je brosse ; pour la tête, on peut pas la brosser si elle est pas du bon côté et presque il regarde à l'intérieur du sabot quand je lui cure les pieds, il le ferait s'il manquait pas de se casser la figure à chaque fois... Oui, c'est le genre de cheval qui essaie de brouter quand on trotte ou galope en extension d'encolure et qui comprend pas pourquoi il finit sur les genoux, à chaque fois... 

Bon, évidemment, si vous posez quelque chose sur la porte ou à côté du box vous êtes sûr que ça finit, dans le meilleur des cas, parterre devant le box, et dans le pire des cas, parterre dans le box et sous ses pieds ou dans sa bouche, ou les deux, tout dépend... Voilà voilà. Ah oui, et puis sinon quand vous le sellez, ben c'est là que ça lui gratte sous la selle, donc si vous mettez la sangle après, comme moi, ben vous avez une chance sur deux de retrouver la selle parterre, ou d'arriver juste à temps pour la rattraper au vol au moment où il la pousse par dessous pour se gratter.

Ah, et aussi il aime pas qu'on lui touche l'oreille droite, enfin si, on peut la toucher quand on veut, sauf... quand on veut mettre le filet, là nan, là il veut pas, il préfère lever la tête très très haut, tellement haut que moi je touche plus parterre, oui parce que moi je lâche pas le filet tant que je l'ai pas mis, nan mais... Bon, j'ai passé un peu de temps sur la pointe des pieds où carrément suspendue, mais ça y est, monsieur à compris que la lourdingue là, elle lâchera pas l'affaire, alors maintenant il baisse même presque la tête pour que l'oreille elle passe plus facilement sous la têtière. Y a quand même du progrès !

Et pour les guêtres c'est comme pour le reste, il faut qu'il regarde si les velcros sont bien mis, on sait jamais !

Une fois qu'on a fait tout ça généralement j'en peux déjà plus, je suis fatiguée ! Ce cheval m'use... Et quand on est dessus, ben c'est un peu pareil, la vieille commère hyperactive, vous voyez le genre ? Mais avec les muscles en plus. Au début c'était l'horreur, il arrachait les rênes à la moindre occasion, il mettait des espèces de coups de tête à vous arracher les cervicales, et pas que vers le bas, sur le côté aussi, histoire d'être bien asymétrique (ça fait encore plus mal !) Ben oui, parce que les coups de tête c'est pas juste pour arracher les rênes, c'est surtout pour regarder ce qui se passe partout, parfois il fait même carrément demi tour, pour regarder derrière, c'est plus pratique. Je passe sur le fait que les entiers adorent les poneys (et les juments mais ça vous vous en doutiez) et que dès qu'il y en a dans les parages, c'est mort pour la concentration, enfin avant, maintenant ça va un peu mieux. Et puis des fois, on sait pas pourquoi, ça lui prend et il se pointe et il boxe, comme ça, tout seul, dans le vide, il faut le savoir. Ça peut surprendre la première fois, surtout quand on sait qu'il est pas très doué et qu'il pourrait se rater... Mais bon...

Allez, passons aux choses sérieuses, comment qu'il travaille ce cheval ???

Ben c'est qu'au début c'était pas gagné ! Une locomotion un peu particulière on va dire, le genre "lapin à roulette" pour ceux qui connaissent l'expression, c'est à dire le cheval avec une cadence et une amplitude au trot qui se rapproche assez bien de celles du shetland. Au pas, c'est pareil, et au galop n'en parlons pas. En fait c'est le cheval qui se dépêche tout le temps mais qui sait pas pourquoi, pas facile... 

Pour vous faire une idée, vous n'avez qu'à imaginer un cheval qui trotte et qui galope du genoux (et du jarret), en montant fort les épaules mais sans aucune propulsion et sans rebond aucun. Le prototype parfait du cheval chaud bouillant qui ne pousse pas un crayon et qui donc, travaille creux, malgré tout le vent qu'il brasse. Sans compter le fait qu'il se sert allègrement de vos bras comme béquille étant donné qu'il ne se tient pas, en fait il se dépêche de venir s'appuyer, c'est pas tout à fait l'idée que je me fais du cheval léger... Et avec l'encolure qu'il a c'est vraiment pas un cadeau ! 

Voilà, donc au départ, on a un cheval plein de sang travaillant dans le plus parfait déséquilibre, ne respectant pas la main, la jambe non plus quand on y regarde de plus près, avec une capacité de concentration plus que limité et une tolérance très faible à la contrariété... Hem, de la tarte, quoi !

Bon ben j'ai tout simplement commencé par lui rendre la vie impossible, c'est à dire qu'il a fait beaucoup, mais alors vraiment beaucoup, genre des kilomètres d'épaule en dedans. Dès qu'il "bourrait à la main", hop, une longueur d'épaule en dedans ! Dès qu'il commençait à s'appuyer, hop, une largeur d'épaule en dedans, et un petit appuyer, et on recommence. Dès qu'il sortait de la main, rebelote, je crois que j'ai passé le premier mois à illustrer le traité de La Guérinière, j'en ai fait dans tous les sens, de tous les cotés, sur des lignes droites, sur des cercles, des carrés, des rectangles, dans le manège, la carrière, le cross, j'ai tout fait ! 

Alors évidemment, je n'ai pas fait que de l'épaule en dedans, mais c'est vraiment le premier truc que je fais quand il commence à accélérer progressivement en mettant de plus en plus de poids et en poussant de toutes ses forces avec son encolure. Au début j'essayais de résister mais c'était peine perdu, son mode de fonctionnement c'était justement la résistance, plus je résistais, plus il résistais dans l'autre sens, vraiment, je ne pense pas que j'aurais gagné ! Du coup, vu qu'il avait envie de foncer tout droit, ben il a fait le contraire, voilà. Il a fait du cercle et du travail de deux pistes, nan mais, on me promène pas comme ça moi, faut pas déconner non plus ! En plus j'aime pas ça faire du tout droit, ça m'énerve, je suis la première à enguirlander mes élèves qui font des tours de carrière bêtement sans rien demander à leur cheval, ça sert à rien, c'est du promène couillon comme on dit chez moi.

Fin bon, du coup, on a revisité toute la panoplie et aux trois allures : épaules en dedans, travers, renvers, appuyers, contre-changements de main et tout le tralala. Pour le coup, j'ai révisé mes gammes ! Au bout de quelques semaines de ce travail, j'ai commencé à avoir un cheval qui se tendait plus facilement et sa cadence s'est ralentie pendant que son amplitude s'est développée. Oui, parce qu'au départ il travaillait très haut et très fermé, il s'encapuchonnait et bourrait à la main dans cette attitude, dos creux et bouche morte, c'était vraiment très agréable... On pouvait même avoir la sensation d'être trimbalé au pas, vraiment génial ! 

Là, il commençait à descendre sa tête et à monter son dos sur quelques foulées à la sortie des exercices. Il se laissait encore pas mal déconcentrer mais j'avais quand même moins de difficultés à le récupérer avant qu'il parte dans son trip "vite faut que j'me dépêche". Une fois que j'ai obtenu ce minimum, nous avons commencé à pas mal travailler sur la réponse à la main et à la jambe. Vous noterez que j'avais toujours ma badine, même avec ce type de cheval qui ne veut qu'avancer tout le temps, comme quoi une badine ça ne sert pas que pour les chevaux "froids". Et bien oui, et cette badine je m'en servais beaucoup pour... m'arrêter ! Et oui, parce que monsieur ne savait pas s'arrêter, il venait se coincer contre la main, mais jamais de la vie ce truc n'était un arrêt, d'ailleurs il ne tenait pas en place, donc c'est bien la preuve. Oui, parce qu'en fait, un arrêt c'est le truc où le cheval il s'arrête en reportant du poids sur ses jarrets, et non pas dans vos bras, là c'est pas un arrêt, c'est un affalement (d'où le cheval qui se retrouve sur les genoux quand on avance les mains...). Et pour que le cheval reporte du poids sur ses jarrets, et bien à un moment, il faut bien qu'il se tienne tout seul et qu'il ne se serve plus de vos mains comme "petites roulettes" vous savez, le truc qu'on doit enlever une fois qu'on a bien appris à faire du vélo et que certains on vraiment beaucoup de mal à lâcher. 

Dès que je voulais m'arrêter, j'utilisais donc ma badine pour lui demander d'activer un peu ses postérieurs afin qu'ils viennent sous la masse, dès qu'il faisait mine de s'appuyer, je repartais et lui demandais une épaule en dedans jusqu'à ce qu'il se tienne de nouveau avant de recommencer. J'y ai passé un paquet de temps... c'est qu'il est têtu l'animal ! J'y arrive tout juste aujourd'hui, au bout de presque deux mois de boulot. Mais rassurez vous, le reste a bien progressé, en fait je crois que c'était le gros point noir, c'est la chose qu'il a eu le plus de mal à assimiler, à côté de ça, c'est un cheval très souple et très agréable lorsqu'il se tend et se met au travail.

J'ai donc beaucoup travaillé sur ma main, j'ai essayé de ne jamais la bloquer lorsqu'il résistait, au contraire, je rouvrais les doigts et je demandais une flexion pour partir en épaule en dedans avec beaucoup de jambe. Oui, parce qu'en fait la résistance venait du fait qu'il ne poussait pas, j'espère que vous l'aviez deviné ! Et donc en le mettant en épaule en dedans, le postérieur intérieur (intérieur à l'incurvation hein, toujours pareil) venait obligatoirement sous la masse, ce qui avait pour effet immédiat de l'alléger, et voilà, c'était gagné. Ne restait plus qu'à lui apprendre à engager ses postérieur aussi en ligne droite. Pour ça j'ai beaucoup utilisé une technique que je trouve très utile : serrer les genoux et les cuisses pour ralentir les épaules du cheval. Etant donné qu'il avait du mal à "rattraper" ses traces (et donc à se "juger" pour ceux qui suivent) avec ses postérieurs, il fallait demander aux postérieurs d'aller plus loin, mais étant donné qu'il se dépêchait tout le temps, dès que je demandais les postérieurs, il précipitait l'allure en bourrant à la main. Du coup, l'allure se dégradait et je n'obtenais jamais l'engagement tant espéré. Il fallait donc tout d'abord ralentir les épaules afin de permettre à l'arrière main de les "rattraper", ou du moins de s'en rapprocher ; et seulement une fois cela obtenu, je pouvais mettre la jambe pour demander une propulsion supérieure de laquelle résultait une meilleure tension de dos et un bout de devant léger dans un relâchement maximum. Et oui, tout ça d'un coup !

Attention, serrer les cuisses ne veut pas dire se crisper, au contraire, cette technique n'est efficace que si le cavalier a la jambe descendue et continue de travailler relâché, sinon cela n'a aucune utilité. Le principe est simple, le cheval étant très sensible à la pression, le fait de serrer les cuisses va lui comprimer légèrement les épaules, il va se retrouver dans un inconfort relatif car il devra "forcer" pour continuer son mouvement, et comme les chevaux (tout comme les humains d'ailleurs) n'aiment pas trop se fatiguer, leur premier réflexe va être de ralentir le mouvement des épaules. C'est à ce moment précis qu'il faut relâcher la pression des cuisse et demander la propulsion avec le bas de jambe tout en restant bien à sa place dans son haut du corps ; les épaules ont ralenti et votre cheval à tendance à "caler" comme s'il voulait retomber dans le pas, c'est exactement à ce moment là que les postérieurs ont la possibilité de rattraper leur retard, il faut en profiter ! Une fois cette sensation obtenue, il suffit de la reproduire à chaque fois que le cheval commence à précipiter : ralentir les épaules, se relâcher, activer les postérieurs, se relâcher, vérifier l'équilibre et la légèreté, recommencer si besoin. 

La sensation du cavalier doit être une impression d'être calé dans un fauteuil très souple et très confortable, lorsque le cheval travaille avec son dos on a la sensation d'être plus haut que d'habitude. Je donne un truc à mes élèves pour reconnaître cette sensation : si vous êtes cavalier, vous avez très certainement déjà senti les muscles du dos de votre cheval se tendre au moment où il lève la queue pour faire son crottin, cette sensation est due au fait qu'il contracte ses muscles abdominaux ce qui a pour effet de lui faire remonter toute la ligne du dos. Et bien lorsque votre cheval travaille vraiment avec le dos, vous devez avoir la même sensation. La première fois que j'ai senti ça, je travaillais au galop sur mon cheval avec mon Mentor, et tout à coup j'ai senti ce truc extraordinaire, au début je passais mon temps à me retourner car j'avais tout le temps l'impression que mon cheval faisait son crottin, mais non ça n'était pas ça, j'avais enfin compris ce que signifiait "mettre le dos". C'est un des plus précieux souvenirs de ma formation je crois. Et en ce qui concerne le bout de devant, c'est à ce moment là que l'on peut commencer à demander l'extension d'encolure, comme le cheval se propulse correctement et qu'il tend son dos, il cherche à descendre sa tête en ouvrant son angle tête/encolure, il reste léger et en équilibre. Lorsqu'il travaille de cette manière, un cheval peut trotter et galoper le nez parterre sans aucune dégradation de son équilibre (sauf s'il essaie de brouter, là ça marche un peu moins bien mais bon, c'est hors sujet), et les transitions, qu'elles soient montantes ou descendantes peuvent, et devraient se faire sans dégradation de cette attitude de relâchement et de tension de la ligne du dessus.

Voilà voilà, donc mon bel étalon noir est maintenant aussi doux qu'un agneaux, il est devenu extrêmement agréable à monter et c'est un vrai plaisir. Bon, on n'est pas à l'abri d'un petit mouvement d'humeur ou d'un petit saut de joie, mais même lorsqu'il se retourne pour regarder les juments qui passent, il fait bien attention de ne plus arracher les rênes, il est devenu civilisé cet animal... Non, et puis il est super attachant, ce n'est pas rare qu'il hennisse quand j'arrive le matin pour m'en occuper. 

Comme quoi, le travail peut aussi être un plaisir ! :)


jeudi 28 juin 2012

Le Renard, le Loup et le Cheval

Fable XVII livre douzième


Un Renard, jeune encor, quoique des plus madrés, 
Vit le premier cheval qu'il eût vu de sa vie.
Il dit à certain Loup, franc novice : "Accourez, 
Un animal paît dans nos près, 
Beau, grand ; j'en ai la vue encor toute ravie.
-Est-il plus fort que nous ? dit le Loup en riant :
Fais moi son portrait, je te prie.
-Si j'étois quelque peintre ou quelque étudiant, 
Répartit le Renard, j'avancerois la joie
Que vous aurez en le voyant.
Mais venez ; que sait-on ? peut-être est-ce une proie
Que la Fortune nous envoie."
Ils vont ; et le Cheval, qu'à l'herbe on avoit mis, 
Assez peu curieux de semblables amis,
Fut presque sur le point d'enfiler la venelle.
"Seigneur, dit le Renard, vos humbles serviteurs
Apprendroient volontiers comment on vous appelle."
Le Cheval, qui n'étoit dépourvu de cervelle, 
Leur dit : "Lisez mon nom, vous le pouvez, messieurs :
Mon cordonnier l'a mis autour de ma semelle."
Le Renard s'excusa sur son peu de savoir.
"Mes parents, reprit-il, ne m'ont point fait instruire ;
Ils sont pauvres, et n'ont qu'un trou pour tout avoir ;
Ceux du Loup, gros messieurs, l'ont fait apprendre à lire."
Le Loup, par ce discours flatté, 
S'approcha. Mais sa vanité
Lui coûta quatre dents : le Cheval lui desserre
Un coup ; et haut le pied. Voilà mon Loup par terre, 
Mal en point, sanglant, et gâté.
"Frère, dit le Renard, ceci nous justifie
Ce que m'ont dit les gens d'esprit :
Cet animal vous a sur la mâchoire écrit
Que de tout inconnu le Sage se méfie."

mardi 12 juin 2012

Le Sketch (catégorie "ça n'a rien à voir")


Ah oui, parce que je ne vous ai pas raconté ! Là quand même ça vaut le coup.


Bon alors il y a quelques semaines j'étais invitée chez une amie au centre ville...

Jusque là, tout va bien. 

Enfin presque. Nan parce que j'aime pas trop le centre ville ; y a que des handicapés du code de la route et à chaque fois je manque de péter les plombs et d'en emplâtrer un, fin bon...

Donc comme mon chéri n'est pas là et qu'il faut faire rouler sa voiture (et qu'elle fait aussi beaucoup plus classe) je décide de la prendre.

Oui, bon, ok, j'aurais dû me dire qu'un break... En centre ville... Fin bon, c'est pas non plus un paquebot et je sais conduire moi Monsieur ! Nan mais. Et puis y a plein de petits radars qui font bipbip, ça va non plus, j'vais pas lui casser sa voiture !

Et puis de toutes façons je l'avais prise dès le matin pour aller travailler et c'était prévu que je me douche chez mon amie car ça m'évitait de retourner chez moi. Oui parce que chez moi c'est forcément complètement à l'opposé. Nan parce qu'on avait quand même réfléchi aussi, c'était tout prévu tout comme y faut. Je finissais mes cours vers 18h30, une demie-heure pour arriver pile à l'heure de l'ouverture des bornes où t'as pas le droit de passer avant 19h, une petite douche et hop, pile poil prête pour 19h30 à l'arrivée des autres invités. Top organisation j'vous dis !

Et même que j'avais pris le GPS au cas où parce que je suis parfois aussi un peu handicapée du sens de l'orientation. Tout prévu la meuf !

Voilà voilà, donc 18h00 arrive, je fini un peu plus tôt donc j'en profite pour passer voir mes loulous à l'écurie d'en face avant de partir. Il fait 30°, je suis trop heureuse d'avoir pris la voiture de chéri qui est climatisée et il ne me tarde qu'une chose : enlever mes chaps, mes boots et ma culotte de cheval et me jeter sous la douche ! Me voilà donc partie, je branche le GPS.

Arrivée au méga rond point fatidique (et merdique surtout) avec 50 sorties et des feux en plein milieu, le GPS me dit de sortir à la sortie d'après celle que j'aurais dit moi... 

Hem, bon, ok je suis nulle alors j'écoute le GPS, mais quand même, c'est louche...

Donc je prends la sortie et je poursuis, évidemment c'est le fameux week-end de la manifestation qui tue et mon amie habite juste là où il faut pas, évidemment... Donc y a des routes coupées qu'on peut pas prendre, je fais 50 détours parce que le GPS il est con, il comprend pas lui, que la route elle est coupée et que c'est pas parce que tu vas te représenter 10 fois devant qu'elle va finir par s'ouvrir ; sans déconner, quand est-ce qu'ils vont comprendre qu'il faut proposer un itinéraire bis quand tu passes pas là où il veut. Alors ok, je veux bien qu'on me prenne pour une débile, mais si je prends pas la route qu'on m'indique c'est peut-être aussi parce que JE PEUX PAS ! Genre, elle est coupée ou elle est en sens interdit ou y a des travaux ou alors ben je la prends pas parce que ma voiture elle est pas équipée pour faucher les maïs (nan nan, sans déconner, ça m'est déjà arrivé, j'vous jure !). Bref...

Je fini par me repérer (et j'avais raison, c'était bien l'autre route qu'il fallait prendre au rond-point... Fin bon, je dis ça, je dis rien hein...) et par trouver une route où je peux passer et où le GPS il finit par dire que bon, ok, par ici aussi ça ira quand même. Je passe sur le fait qu'il est 19h ou pas très loin, que c'est l'heure de pointe et que y a plein d'handicapés du code de la route partout, et chez nous, c'est les pires que j'ai jamais vu de toute la France hein ! Et pourtant j'en ai vu des handicapés du volant, chacun sa spécialité selon la région mais ici, ben on cumule, c'est la totale méga full options... Re bref...

Me voilà sur une route à sens unique (dans le bon sens, je précise) où on roule à peut-être 15km/h parce que doit y a voir un cédez le passage au bout j'imagine et je dois être à  deux minutes de l'arrivée et de ma douche. 

Et là ! Là, y a un gars qui est garé en triple file le long d'un parking en épi, donc juste à peine pas du tout là où il devrait être vu qu'on est à sens unique et qu'il n'y a qu'une voie, ok large, mais quand même. Et là, ben le gars que j'avais pas vu (moi j'avais vu que la voiture et quand même ça passe large), et ben il s'éjecte littéralement de sa voiture au moment où je passe. Alors je dis bien : il S’ÉJECTE ! 

Oui oui, nan parce qu'il aurait pu faire comme tout le monde, regarder dans son rétro, entrouvrir sa portière histoire de jeter un oeil... Ben non, non lui il sort comme s'il était à Fort Boyard avec tous les gens qui lui crient : 

"ALLEZ SORS ! SORS ! TU VAS RESTER ENFERME SINON !!!!"

Voilà. Donc il est 19h et je viens d'arracher la portière d'un gars, enfin, elle tient encore hein, c'est juste qu'elle est pas du tout pliée dans le bon sens... 

ET J'AI JUSTE ENVIE DE L'ASSASSINER !!!! Bordel de merde !

Oui, j'ai des envies de meurtre des fois, d'ailleurs, je me gare, je descends et je me retiens très fort de lui en coller une, oui parce que moi j'ai même pas peur des gens quand je suis énervée (c'est moi qui leur fait peur d'abord) et juste je l'insulte, juste. Et lui, ben il dit rien, je crois qu'il est en état de choc, à moins que ce ne soit son état permanent, j'sais pas...

Alors j'ai mon rétro qui est pété, enfin juste le plastique, parce que même que il se replie encore tout seul quand la voiture se ferme automatiquement quand je m'éloigne (ouais, je fais trop ma belle je sais...) et j'ai les deux portières de refaites quoi, le top... Donc je m'approche du gars et je lui dis presque pas gentiment du tout qu'on va faire un constat et là, le gars il me répond (sans déconner hein, mot pour mot) :

"-D'accord, mais juste une minute je vais chercher le pain parce que ça va fermer... 

-  --' Je crois que je vais me le faire !" (Nan parce que c'est vrai, moi je suis pas attendue du tout quelque part, je devrais peut-être aller chercher du pain aussi tant que j'y suis...)

Donc Monsieur va chercher son pain, qu'il paie par chèque (nan mais j'vous jure, un sketch, le truc que tu le racontes, personne te croie) et enfin, il arrive pour remplir le constat que c'est moi qui lui ai rempli parce qu'il en avait jamais rempli de sa vie (sans déconner !?!) et le constat il était pré daté comme avant avec le 19__ pour rajouter que les 2 derniers chiffres, que même qu'il y a plus les même cases dans les constats d'aujourd'hui ! (Re sans déconner !?!)

Voilà voilà, donc je suis arrivée méga en retard, encore en tenue et pas du tout énervée devant les invités... 


J'ai malgré tout passé une bonne soirée, rassurez-vous ! 


Oui, parce que j'avais oublié, c'était aussi un peu la veille de mon anniversaire..... Si ça s'était passé le lendemain j'aurais pu croire que j'avais la poisse, mais là, non, pas du tout.


lundi 11 juin 2012

Bucéphale


Bucéphale était le cheval d'Alexandre le Grand, fils du roi Philippe de Macédoine, dont le prénom signifie d'ailleurs "l'ami des chevaux" en grec. Cette histoire d'amour entre celui qui vainquit les Perses à vingt-deux ans et son cheval est probablement l'une des plus belles du monde. L'une des plus fascinantes aussi. Tous deux avaient presque le même âge, tous deux moururent au début de leur trentaine. Ensemble il conquirent le monde.

Bucéphale appartenait à la meilleure race de Thessalie, région de Grèce d'où étaient originaires les Centaures, ces fabuleuses créatures au buste d'homme et au corps de cheval. Bucéphale et son cavalier Alexandre allaient constituer la personnification la plus aboutie, la plus parfaite, de ces êtres chimériques.

Bucéphale, dont le nom veut dire "à la tête de taureau", allusion probable à son front large et à ses naseaux courts et écartés, était noir, portant une étoile blanche sur le front. Il possédait un oeil vairon, dont l'iris était entouré d'un cercle blanchâtre, et il était beaucoup plus grand que la plupart des chevaux de l'époque.

D'ascendance grecque, comme sa fougueuse monture, Alexandre, né en 356 av. J.C., était persuadé d'être d'essence divine. Il prétendait descendre d'Achille en droite ligne, par sa mère. D'ailleurs, il ne dormait jamais sans une copie du fameux récit d'Homère l'Illiade.

Bucéphale était si fougueux que personne n'avais jamais réussi à le monter. Alexandre, âgé de douze ans seulement, mais qui avait déjà pris part à des batailles et était un cavalier émérite, releva le défi. Il dompterait l'indomptable. Il commença par étudier le comportement du grand cheval noir, cherchant la faille. Il s'aperçut alors que l'animal avait peur de son ombre comme de celle des hommes qui s'approchaient de lui. Tendre et cajoleur, le jeune homme parvint à placer le cheval face au soleil et l'enfourcha, le faisant galoper en tous sens avant de revenir vers son père. "Tu devras te chercher ton propre royaume, mon fils, la Macédoine est trop petite pour toi", fut le seul commentaire du souverain visionnaire.

A partir de ce jour, Bucéphale se laissa monter à cru par les valets, mais quand il était paré du harnais royal, seul Alexandre était accepté. Le cheval se mettait alors à genoux pour aider son maître à monter.

Pendant presque vingt ans, Alexandre et Bucéphale combattirent ensemble. L'une de leurs plus grandes victoires fut celle gagnée sur Darius le Grand, empereur de Perses, à Issos, en 333 av. J.C. Le couple légendaire étendit les frontières de l'Empire grec de l'Egypte, où le roi fonda la ville d'Alexandrie, à l'Inde. L'illustre Grec et sa monture devinrent les maîtres d'une grande partie du monde connu de l'époque, contribuant à la diffusion de la culture hellénistique parmi tous les peuples conquis.

Mais même les plus belles histoires ont une fin, et celle d'Alexandre et de son inséparable Bucéphale se termine comme on peut s'y attendre, à la guerre : celle qui opposa Alexandre à Pôros, roi indien du Pendjab, lors de la bataille de l'Hydaspe, en l'an 326 av. J.C. Bien que mortellement blessé, le vaillant Bucéphale ne permit pas à Alexandre de monter un autre cheval, et, réunissant ses ultimes forces, mena son auguste maître à la victoire. La bataille gagnée, couvert de sang et de sueur, il s'allongea enfin pour succomber à ses blessures. 

Plus que la perte d'une monture, le roi de Macédoine déplora la disparition d'un ami véritable. Reconnaissant, il fit ensevelir son cheval avec les honneurs militaires et fonda sur ce site la ville de Bucéphalie, qui fut pour toujours dédiée à son compagnon.



                                                          Récit tiré du livre 100 Chevaux de Légende (éditions Solar)







samedi 9 juin 2012

Mes deux mini billes de clown


Cela fait quelques temps que nous avons accueillis deux petites merveilles aux écuries. Deux poneys trop mignons, tous pitchounes avec leurs grands yeux et leurs minuscules petites oreilles. Deux bébés poneys de 2 et 3 ans, vraiment adorables. Bon, lorsqu'ils sont arrivés ils ne ressemblaient pas à grand chose, ils étaient tous maigrichons et ils avaient encore leur moche poil d'hiver.

Nous les avons laissés tranquilles quelques semaines, le temps de les vermifuger et de les remplumer un peu. Nous avons tout d'abord essayé de les insérer dans le groupe avec les grands poneys, mais les pauvres se sont fait agressés immédiatement et les autres étaient vraiment très méchants avec eux. Nous avons donc pris la décision de les laisser tous les deux et de leur faire un deuxième enclos. En gros, depuis qu'ils sont là, ils servent de tondeuse à gazon pour les abords de l'écurie et ils tiennent compagnie au gros St Bernard qui se trouve de l'autre côté des box. 

Ils sont aussi l'attraction du poney club tellement ils sont choupinoux. Tous les enfants veulent les voir, les caresser, les brosser, enfin bon... Les pauvres, si ça ne tenait qu'aux enfants, ils n'auraient pas une minute tranquille. C'est vrai qu'ils sont vraiment à croquer, en plus nous avons la chance qu'ils soient vraiment sociables et assez proche de l'homme. Bon, le petit bai est une vraie petite teigne, il s'échappe tout le temps, vous nargue quand vous lui courrez après et passe à côté de vous en ruant et en secouant la tête comme le ferait un chien qui joue avec son maître, mis à part que le chien écoute habituellement le maître... L'autre est plus timide, c'est le plus grand et aussi le plus jeune, il a un an de moins et il était vraiment très maigre en arrivant. Là il a bien grossi, et surtout il a poussé tout d'un coup, il a une belle robe alezan foncée et la tête presque noire. Il a une allure de mini cheval tellement il est élancé, un vraie petite gravure.

Nous les avons donc laissés tranquilles au maximum et ils se sont bien habitués au rythme des écuries, comme ils sont tous jeunes, ils ne commenceront vraiment à travailler que l'année prochaine. En attendant, nous avons commencé à les manipuler un peu pour qu'ils s'habituent gentiment à leur futur métier de poney d'école. Les premières fois que nous avons essayé de prendre les pieds du petit bai ça n'a pas été triste ! Il se mettait à gratter, une fois il s'est presque couché, et à plusieurs reprises il s'est carrément mis debout en s'appuyant sur la jambe que je tenais... Bon, comme il pèse trois cacahuètes et demies, ça m'a plus amusé qu'autre chose. On a répété l'exercice quelques fois et maintenant ça y est, il ne les donne pas non plus parfaitement, mais il veut bien nous faire l'honneur de nous les prêter quelques secondes. C'est déjà pas mal !

L'alezan est beaucoup plus docile mais cela n'empêche qu'ils ont tous les deux beaucoup de sang, à mon avis ce ne sera pas le genre de poney plan-plan qui se traîne au milieu de la carrière, je pense qu'il va falloir un peu s'accrocher ! D'ailleurs, un jour que j'avais un peu de temps, j'ai demandé à une de mes grandes élèves de venir pour commencer à les habituer un petit peu à la carrière. Nous les avons pris en licol simplement en y accrochant une paire de rênes sur les anneaux latéraux afin de leur apprendre à tourner et à s'arrêter. Avec une petite badine chacune pour leur apprendre le mouvement en avant. 

Nous voilà donc parties avec nos deux poneys en main dans la carrière à travailler "aux longues rênes" avec notre badine. Bon, alors évidemment la carrière ça n'est pas intéressant, il n'y a pas d'herbe et les copains sont de l'autre côté, il a donc déjà fallu une bonne dose de persuasion pour les faire avancer vers le fond alors qu'ils n'avaient qu'une envie : celle de ressortir. C'est justement cette envie de retourner vers l'entrée qui nous a servi à leur faire comprendre l'utilité des rênes et de la badine. Je ne sais pas combien d'aller-retour nous avons fait mais nous étions crevées, surtout mon élève qui avait vraiment toutes les peines du monde à contrôler la direction de son bolide, à tel point que s'il y avait eu des spectateurs, je pense qu'ils se seraient demandé qui des deux promenait l'autre... J'ai une petite idée mais je n'en dirai pas plus.

Nous avons fait beaucoup d'allers vraiment très lents, et nous avons également fait quelques retours beaucoup plus rapides que prévus... Ils sont petits mais costauds les bougres, deux ou trois fois ils se sont mis à jouer et alors que nous voulions simplement trotter ils sont partis en accélérant comme des petits fous au galop et en coups de cul. C'était vraiment trop mignon, mais il faut suivre quand même parce qu'un poney lancé ça ne s'arrête pas si facilement ! Comme ils étaient vraiment "sages" et assez coopératifs, nous en avons profité pour leur faire passer de petites barres et même un petit obstacle. Là pareil, nous avons failli finir au tas plus d'une fois parce qu'une fois qu'ils avaient sauté, ils partaient comme des petits cabris en coups de cul et au galop... Enfin bon, nous avons bien ri et les poneys ont tout de même, je pense, réussi à intégrer quelques notions telles que le fait de céder, de tourner, d'avancer et de s'arrêter. Bon avec toutes les approximations que vous imaginez tout de même hein, faut pas exagérer !

Après cette séance, nous les avons de nouveau laissés tranquilles un petit moment en leur posant tout de même sur le dos de temps à autres un cobaye passé par là (les enfants de la propriétaire du lieu) pour voir... Pas vraiment de réaction, donc c'était parfait ! Ensuite j'ai par deux fois fait monter le plus vieux des deux (la petite teigne) par des élèves un peu plus grands pour qu'il s'habitue à avoir un peu de poids sur le dos et pour qu'il ne puisse pas non plus faire n'importe quoi, enfin presque pas n'importe quoi... Les deux séances se sont passées dans un désordre plus ou moins organisé, mais je pense que ça lui a quand même permis de comprendre ce qu'il faisait là et cela m'a permis à moi, de voir qu'il n'avait vraiment pas une once de méchanceté. Il n'a jamais essayé de se débarrasser de son cavalier ; bon, il a essayé de lui mordre les pieds mais personne n'est parfait, il ne s'est pas couché ni emballé ni pointé ni roulé avec son cavalier sur le dos, il a plus ou moins essayé de comprendre ce qu'on lui voulait donc, vraiment, pas grand chose à lui reprocher. 

Voilà, et aujourd'hui j'ai donc pris la décision, vu que c'est la fin d'année et qu'il vont partir au pré pour deux mois, de leur mettre leur premier vrai cavalier sur le dos avec une selle, un tapis et tout et tout. Ils ont été adorables au brossage, la petite teigne s'est même laissée curer les pieds sans trop broncher (bon, c'est moi qui l'ai fait mais quand même !) et ensuite nous sommes partis à l'aventure dans la carrière. Les deux petites filles qui les montaient étaient accompagnées de deux grandes pour leur tenir les poneys. Et oui, parce que non seulement ce sont des bébés poneys, mais en plus les gamines ont à peine une année de pratique, elles se débrouillent bien mais elles ont l'habitude de monter mes deux mamies qui sont aussi tranquilles que des baleines échouées (enfin, à la maison hein, en concours ce sont deux furies...). Mais pourquoi leur faire monter si elles sont si "débutantes" ? Ben parce que ce sont les seules qui sont à leur taille et qui on des chances de rester dessus, tout simplement... Voilà voilà.

Evidemment nous n'avons travaillé qu'au pas et au trot, les grandes ont bien couru, les petites se sont bien marré et les poneys ont été adorables. Bon, heureusement qu'ils étaient tenus parce que certains coup de talons auraient pu poser quelques problèmes tout de même. La direction est loin d'être acquise mais il y a du progrès, le frein, c'est pas tout à fait ça, et l'accélérateur, ben ça dépend un peu du moment mais on voit qu'il y a de la ressource de ce côté là ! Nous leur avons même fait franchir une petite barre au trot et ils ont passé quelques minutes sans chaperon, au pas, "pour voir". Oui, je sais, je vis dangereusement... Mais il faut croire que les risques sont bien calculés car le drame n'a pas eu lieu ! Aucun n'est parti au triple galop vers la sortie en passant sous la barrière dans laquelle se seraient irrémédiablement encastrés le buste et la tête de leur cavalière... Nan mais je déconne hein, ils peuvent pas passer sous la barrière.

Voilà voilà, une petite balade au pas autour des écuries pour finir, et nous voilà rentrés après notre toute première journée de poneys d'école. J'en connais quelques un(e)s qui vont bien dormir ce soir...

vendredi 8 juin 2012

Le Grisou (Quel type de travail pour quel type de cheval ?)


Allez, je vous parle d'un autre de mes "pensionnaires". Un magnifique anglo par Zandor Z, pas très grand, assez compact avec un dos un peu "rigide", plutôt gras mais ce n'est pas rare pour les chevaux de sport, et de CSO en particulier et pour couronner le tout, fait en descendant.

Ce cheval s'est retrouvé sous mes fesses parce que son cavalier est un brillant étudiant qui n'a pas toujours le temps de monter ses chevaux régulièrement, surtout pendant les exams... Ce grisou là n'a aucun problème de cavalier, alors évidemment personne n'est parfait mais franchement, si tous les pro montaient aussi bien que lui, je pense que beaucoup de chevaux seraient très heureux ! 

La seule chose est que ce cavalier n'est pas vraiment versé "dressage", il est assez doué pour savoir utiliser ses chevaux sans chercher à les "modifier", du coup il ne se prend pas vraiment la tête avec ça. C'est un peu dommage mais du coup ça me laisse l'occasion de lui apporter un plus quand je travaille ses chevaux. Faut bien que je serve à quelque chose quand même !

Bon, ce cheval est assez compliqué parce qu'il est très asymétrique, il est purement gaucher, donc tout le temps incurvé à droite et pas qu'un peu ! De plus il est bourré de sang, assez caractériel et surtout d'une extrême susceptibilité. Tout pour plaire ! D'un autre côté, quand on sait le prendre, il essaie vraiment de vous faire plaisir.

Au box c'est un amour, un peu coquin et joueur mais super respectueux et câlin avec ça. Un petit amour de cheval de fille ! Une fois à cheval en revanche, c'est légèrement différent. Ce qui est très étonnant c'est qu'il est bourré de sang, et pourtant, il n'avance pas. Au pas, si vous le laissez faire, il marche à deux à l'heure, et au trot c'est encore pire, s'il pouvait reculer je pense qu'il le ferait... Et à l'autre bout c'est encore plus compliqué, sa bouche peut être aussi dure et morte qu'un bloc de béton, c'est d'ailleurs le cas la plupart du temps et surtout à main gauche. Mais comment faire ?

Déjà, au pas, il faut le faire marcher mais attention, sans le vexer hein, nan parce que si on exige au lieu de proposer c'est même pas la peine ! Monsieur se met debout, fait demi tour, jette le cul, enfin bon, tout sauf calme quoi... Oui, il peut rétiver si on le vexe, j'en ai fait l'expérience la première fois que je l'ai monté, depuis je lui dis "vous" et ça va beaucoup mieux. Il fait parti de cette catégorie de chevaux qui ne vous signent pas de chèque en blanc, il faut argumenter tout ce que vous faites, lui prouver le bien fondé de votre action, et c'est seulement là qu'il acceptera d'essayer à votre façon. Tout un programme, surtout qu'il ne souffre aucune contrainte au niveau de sa bouche, tout doit se passer dans la jambe et dans l'assiette, la main ne fait que suggérer par petites touches. Et oui, la bouche n'est pas si morte que ça en fait, elle est juste extrêmement soupçonneuse. Pas moyen de lui faire avaler n'importe quoi, pas d'action de main inconsidérée, de toutes façons, elle s'opposerait à une résistance complète.

En effet, quand ce grisou a décidé qu'il ne tournerait pas la tête, vous pouvez bien faire tout ce que vous voulez, si ce n'est pas la bonne chose vous obtiendrez, au mieux, rien et au pire, c'est à dire si vous utilisez la force, vous vous retrouverez le cul parterre après une bonne diagonale de ruades explosives. On n'exige rien d'un Prince messieurs dames !

Donc, depuis que je côtoie ce bel ombrageux, j'ai appris qu'il acceptait très bien qu'on exige de lui qu'il avance si on l'exigeait avec politesse. Je lui ai appris à accepter le stick (oui parce qu'au début un simple effleurement et c'était le drame international, l'incident diplomatique ! Monsieur se mettait dans tous ces états !), aujourd'hui il a compris le code et me fait le plaisir d'y répondre la plupart du temps d'une manière très satisfaisante. Pareil pour la jambe, il y était assez froid, il l'est toujours mais il commence à l'écouter un peu mieux. Voilà, donc la première chose a été de le faire avancer et de délier toute cette grosse mécanique un peu grippée afin d'aller vers le relâchement.

Là vous êtes en train de vous demander comment son cavalier le monte, lui, si moi j'ai tous ces problèmes ! Et bien je vais vous le dire, il y a deux choses ; déjà, et c'est un mystère que j'ai du mal a expliquer, lorsqu'il saute ce cheval n'est plus du tout le même. Il s'emploie beaucoup plus et beaucoup mieux, il devient léger du moment qu'on ne lui demande pas de revenir, c'est à dire : très peu de main. Et pour le reste, son cavalier ne lui demande rien, donc il le monte en le laissant très ouvert parce que ça ne porte pas à conséquence pour les concours. Seul le problème du virage à gauche reste, et oui, parce que même en concours, Monsieur ne se plie pas à gauche, donc lorsqu'un virage un peu serré à gauche se présente, il est rarement à l'abri d'une faute, c'est tout le problème, et l'unique problème en fait ! C'est là que j'essaie d'intervenir, comme je peux...

La première chose est de le faire avancer, ou plutôt, de le faire passer devant. On ne parle là pas de vitesse mais de propulsion, toujours la même. L'avantage de ce cheval, c'est qu'il a un dos tellement compact qu'il ne peut pas travailler creux, il peut juste ne pas travailler du tout. Bon, une fois devant, ce fut déjà un grand pas en avant, j'ai pu commencer à obtenir un contact avec la bouche, une bouche très résistante mais tout de même un peu plus moelleuse qu'au début. 

L'essentiel et le plus gros du travail avec lui s'effectue au pas, je le mets devant, ensuite je lui demande de vraiment contrôler ses épaules parce qu'en fait, il est continuellement effondré sur l'épaule gauche, d'où l'impossibilité de se plier (et donc encore moins de s'incurver) de ce côté là. J'ai donc passé beaucoup de temps au début à lui demander des petites cessions, quelques foulées d'épaules "en dehors" vu que j'étais à main droite et que je voulais que son épaule gauche reparte vers la droite. Quand j'étais à main droite je lui demandais des plis à gauche, contre incurvation etc... Et inversement à main gauche pour dédramatiser la situation, il trouvait donc la main droite légèrement inconfortable mais il était à main droite donc ça va, et à main gauche tout compte fait c'était pas si pire puisque je le pliais du côté où il était à l'aise. J'ai ainsi pu commencer à lui faire oublier cette "peur" de passer à main gauche où il anticipait et se contractait en s'arc boutant avec le bout du nez à droite contre vents et marées. Ce ne fut pas de la tarte, et ça n'en est pas encore aujourd'hui !

Petit à petit il a commencé à me faire confiance et à bien vouloir essayer de nouvelles choses que je lui demandais. Nous avons commencé les épaules en dedans et les cessions aux deux mains, toujours au pas, puis les huit de chiffres. Je crois que ça a été la plus grosse étape, le jour où il a compris comment passer d'une incurvation à l'autre juste en avançant un peu plus son postérieur sous la masse il a eu une sorte de déclic. Il s'est dit que même si c'était dur c'était quand même à sa portée. 

En effet, son cavalier l'a fait voir à moult dentistes, ostéopathes, vétérinaires qui n'ont rien pu faire à cette asymétrie, il est fait comme ça, c'est un sacré handicap donc il faut essayer de lui trouver des solutions pour qu'il obtienne un certain confort dans le travail.

Une de ces solutions, comme pour tous les autres, c'est l'engagement et la propulsion. Plus il engage ses postérieurs sous la masse, plus il arrive à alléger le poids qu'il a sur les épaules, et plus il trouve de confort dans l'incurvation et dans le travail en général. Étant donné qu'il est fait en descendant, je n'ai jamais trop cherché à lui refermer l'angle tête/encolure, cela aurait accentué encore plus son déséquilibre. D'autre part, il a vraiment de grosses ganaches avec une attache de tête assez épaisse, pas grand chose pour aider à la mise en main quoi !

Cependant, après quelques semaine de ce type de travail au pas, puis au trot, j'ai eu la surprise de le voir enfin se relâcher, se délier et... se mettre en main ! Alors évidemment ce n'est pas une mise en main très académique, il trouve pour l'instant le confort en maintenant un port de tête assez bas mais il reste néanmoins extrêmement léger et en équilibre. Il s'incurve très bien à droite, toujours avec plus de difficulté à gauche. De ce côté, il faut toujours l'aider à trouver la solution en lui demandant se passer son postérieur sous la masse avec la jambe et l'assiette. Parfois, en fin de travail, lorsque la mécanique est bien huilée, il trouve la solution tout seul. C'est fou la capacité qu'on les chevaux à trouver un équilibre, alors qu'ils n'ont physiquement rien qui les y aide, simplement avec de la justesse dans le travail.

Aujourd'hui il est capable de travailler en extension d'encolure parfaitement incurvé aux deux mains, il peut également exécuter de très jolies courbes serrées à gauche, mais pas systématiquement, il y a toujours un blocage quelque part. Cette épaule gauche lui échappe continuellement, et si le cavalier n'est pas là pour la rappeler à l'ordre, lui n'arrive pas à se corriger de lui même. Je ne travaille pas les figures avancées de dressage, car avec son physique, je pense que son moral ne le supporterait pas, ce serait beaucoup trop dur. Nous continuons donc sur les cessions, les épaules en dedans et les têtes au mur, parfois même nous nous aventurons sur quelques foulées d'appuyer car cela l'aide vraiment à contenir cette vilaine épaule même si ça le fait beaucoup râler. 

En ce qui concerne le travail au galop, nous avons beaucoup travaillé les départs qui étaient plus qu'approximatifs en faisant beaucoup de transitions montantes et descendantes en l'obligeant à continuer de pousser quelque soit l'allure. Il avait tendance à complètement s'ouvrir en partant, et surtout à partir dans un trot désordonné avant de prendre le galop, et dans les transitions descendantes il s'arrêtait net, en lâchant complètement le dos. Il se plantait littéralement dans le sable... Ensuite nous avons travaillé au contre galop, cela lui a fait énormément de bien, exactement pour les même raisons que je le travaillais en contre incurvation au début. Au galop à droite à main gauche il était content parce qu'il galopait à droite, et au galop à gauche à main droite, il était content parce qu'il tournait à droite ! L'art et la manière de brouiller les pistes !

En ce moment nous commençons à travailler les changements de pied, mais cette fichue épaule nous embête toujours. Il faut vraiment lutter pour que tout reste en place jusqu'au bout, et quand j'arrive à tout garder bien en place le changement de pied ne passe pas trop mal. Mais maintenant j'aimerais qu'il commence à mettre toutes ces choses en place de lui même, nous n'y sommes pas encore mais je ne désespère pas !

mardi 5 juin 2012

Quel type de travail pour quel type de cheval ?


Bon, en ce moment j'ai plusieurs chevaux au travail et ils sont tous très différents. J'ai une  toute jeune jument en début de travail qui est légèrement derrière la jambe, un hongre fait en descendant avec un dos assez compact et "dur", un entier très chaud qui travaille assez creux et le mien qui est à moitié rétif...

Je leur demande tous la même chose, c'est à dire d'être "en avant, calme et droit" comme dirait le Général l'Hotte mais cela ne se matérialise pas du tout de la même manière selon que je suis sur tel ou tel cheval, c'est vraiment intéressant.

Pour aujourd'hui nous allons parler de la jument, la plus jeune et d'ailleurs, certainement parce qu'elle est jeune, la plus facile. C'est une jument de 6 ans qui a été débourrée dans son année de 5 ans si j'ai bien compris, donc elle est toute verte et déjà très prometteuse. Lorsque je l'ai "récupérée" elle était très peu musclée, avec une encolure de cygne et une espèce de boule de muscle juste en arrière de la nuque car elle travaillait complètement enfermée et derrière la main. Elle avait très peu de dos et pas de croupe du tout. C'était une assez grande jument faite toute en hauteur, des grandes pattes, une grande tête et très peu de muscles.

Je l'ai pas mal regardé travailler avec sa cavalière, une cavalière de dressage d'une cinquantaine d'année qui avait très peur lorsqu'elle l'a achetée, et la première conclusion était que cette jument ne poussait pas. Elle était toujours en dedans de la main dans des allures très raccourcies et sans propulsion ce qui convenait très bien à sa cavalière étant donné que de cette manière elle obtenait un certain confort, totalement superficiel mais néanmoins appréciable pour quelqu'un qui a peur, la jument était légère (forcément) et elle n'allait pas trop vite (tu m'étonnes !).

Bon, donc la première chose que nous avons fait avant que je monte dessus fut de la travailler un peu différemment même si la cavalière a eu du mal à comprendre où je voulais en venir au départ. Heureusement j'ai la chance qu'elle me fasse assez confiance pour tenter le coup malgré ses réticences. Donc j'ai demandé à sa cavalière de l'ouvrir au maximum, c'est à dire de lui faire ouvrir l'angle tête/encolure tout en lui demandant un propulsion bien supérieure. La cavalière en est encore à peu près à ce stade avec beaucoup de progrès de la jument au niveau de la locomotion et de la mise en main, et maintenant nous allons parler du travail que je fais de mon côté.

La première fois que je suis monté dessus, j'ai eu l'impression d'être assise sur un éléphant, vous savez, ces sièges très en hauteur qui donnent le mal de mer tellement ça tangue. Très bizarre comme impression pour une jument qui a le dos plutôt creux. L'impression d'être perchée sur le garrot avec un dos inexistant, ou peut être un dromadaire, je ne sais pas... Ensuite il y avait deux choses vraiment dérangeantes, elle ne poussait pas un crayon, zéro propulsion et en plus elle refusait le contact. Le truc pratique, rien devant, rien derrière, ça commençait pas très bien ! A côté de ça, une petite jument adorable qui ne demande qu'à apprendre et très à l'écoute.

J'ai donc commencé par la base, la réponse à la jambe et la propulsion, c'est pas tout d'avancer, il faut avancer en poussant et non pas en se tractant (ça marche moins bien). Comme toujours avec ma badine, nous avons commencé par une petite leçon de jambe et la louloute a vite compris ce que je voulais, cependant elle cherchait constamment à s'enfermer. Dans tous les virages, et parce que sa cavalière le lui avait appris comme ça, elle se tordait : tête à l'intérieur, épaules qui s'échappent à l'extérieur et postérieurs à la traîne quand ils ne dérapaient pas carrément. La première séance a été compliquée car j'avais de gros problèmes de direction, en fait, vu qu'elle s'enfermait complètement, je n'avais aucun contrôle sur les épaules. Résultat j'avais une jument totalement flottante, aucune trajectoire précise et parfois de vraies mésententes, une jument qui tourne à gauche alors qu'on voulait aller à droite tout cela en s'effondrant sur son épaule extérieure... Le truc vraiment pas pratique ! En plus elle m'a fait un coup en traître, elle a eu peur lorsque j'ai voulu poser ma veste sur un chandelier, elle est partie comme une folle furieuse et j'ai dû lâcher ma veste en cours de route parce que j'ai bien cru qu'on allait traverser les barrières ! Depuis j'ai pris le temps de faire quelques séances de désensibilisation, ça fait vraiment pas de mal !

Les premières séances ont donc été consacrées à la mise en avant et à l'ouverture de l'angle tête/encolure afin d'améliorer la propulsion et la tension de la ligne du dessus. Il faut savoir que l'on contrôle bien mieux les épaules d'un cheval ouvert que d'un cheval enfermé. D'ailleurs, et tant qu'on y est, il est bien préférable d'avoir un cheval ouvert qui se propulse qu'un cheval "fermé" qui se traîne ce que beaucoup de cavaliers ont du mal à saisir. 

D'autre part, et c'est une chose essentielle, la mise en main n'est pas un moyen de travailler un cheval, c'est une conséquence d'un cheval bien travaillé. Donc, on peut très bien avoir une cheval "fermé" qui travaille mal et un cheval ouvert qui travaille bien, le premier tendra à se creuser de plus en plus et à perdre sa musculature, alors que le second finira par venir se mettre en main lorsque la musculature et la souplesse de son dos le lui permettront. 

Attention, on peut aussi très bien avoir un cheval ouvert qui travaille mal, mais il travaillera toujours mois mal qu'un cheval enfermé (à mon avis en tous cas). La clé c'est la propulsion et la tension de la ligne du dessus.

Au départ la jument avait déjà un joli trot, elle faisait bien illusion, en revanche, au galop ce n'était pas la même chose, elle galopait presque sur place en se raccourcissant, c'était vraiment très désagréable. Elle avait également cette attitude dans toutes ses transitions descendantes, elle lâchait la main et creusait le dos. Alors la cavalière était très contente car les transitions étaient assez nettes, c'est sûr puisque la jument se désengageait complètement et se "plantait" dans le sable immédiatement. D'un autre côté, pour repartir, c'était une autre paire de manches... 

Une fois la propulsion et l'attitude constante, nous avons donc travaillé ces transitions. L'important c'était de la garder ouverte et en avant même pendant la transition, dès qu'elle passait derrière je remettais des jambes pour la faire repartir et je redemandais plus loin. Pas question de lui laisser passer une transition dans laquelle elle ne se serve pas de ses postérieurs sous la masse pour "s'asseoir". 

Une fois les problèmes de rectitude et de propulsion endigués (je ne dis pas réglés car on n'a jamais assez de rectitude) nous nous sommes attaqués au dressage à proprement parler. Nous avons commencé quelques petits exercices d'assouplissement tels que l'épaule en dedans ou la contre incurvation. Nous avons commencé par la contre incurvation qui m'a été très utile pour augmenter la rectitude étant donné que la jument s'échappait toujours dans les virages avec son épaule extérieure. J'ai donc énormément travaillé en contre incurvation pour la remettre en ligne et augmenter la propulsion, car comme chacun sait, un cheval droit pousse beaucoup mieux qu'un cheval tordu. 

Pour expliquer un peu mieux au cas où ce ne soit pas très clair, un cheval incurvé a tendance a mettre le bout du nez trop à l'intérieur du cercle, c'est à dire qu'il n'est d'ailleurs plus incurvé mais tordu (souvent du fait du cavalier ne nous leurrons pas), ce qui provoque un dérapage du reste du corps et en particulier des épaules qui fuient à l'opposé. L'exercice de contre incurvation revient donc à faire l'inverse, sans tordre le cheval si possible, il consiste donc à mettre le bout du nez du cheval légèrement à l’extérieur ce qui aura pour effet de remettre les épaules dans l'axe du corps et donc d'améliorer la rectitude et par voie de conséquence, la propulsion.

Attention, dans tous ces exercices, l'importance de la rêne extérieure est primordiale (quand je dis extérieure, je parle par rapport à l'incurvation hein) ainsi que celle de la jambe intérieure (toujours pareil, intérieure à l'incurvation). La rêne intérieure ne sert qu'à emmener légèrement le bout de nez, la rêne extérieure quant à elle contrôle les épaules, c'est d'elle que dépend la réussite de la plupart des exercices de dressage à proprement parler. Lors d'un travail faisant appel à l'incurvation, c'est à dire pratiquement tous les exercices de dressage pur (épaule en dedans, tête au mur, appuyers et même pirouettes) le cheval se déplace entre la jambe intérieure et la rêne extérieure ou entre la rêne extérieure et la jambe intérieure selon le sens de déplacement, ce sont ses points de repères. Dans la plupart des cas, la rêne intérieure est un problème car trop employée, elle parasite la figure en tordant le cheval. En ce qui concerne la jambe extérieure, elle est là pour tenir ou pousser les hanches selon l'exercice. Bon, c'est un peu réducteur, mais les grands principes sont là me semble t'il.

Voilà, donc en ce qui concerne l'épaule en dedans, toute la difficulté tient dans le fait de tenir cette épaule extérieure qui ne cherche qu'à s'échapper pour retourner sur la piste. La première chose est de ne surtout pas laisser s'enfermer la jument parce que sinon là c'est perdu d'avance, ensuite il faut absolument garder la propulsion car fatalement, la difficulté de l'exercice aidant, l'impulsion va avoir tendance à diminuer fortement. 

En parlant de ça, je garde toujours en mémoire une des plus belles phrases que mon Mentor ait partagé avec moi : "On ne travaille que sur de l'impulsion créée". Autrement dit, on ne prend jamais sur l'impulsion naturelle du cheval pour faire un exercice, il faut créer de l'impulsion pour ensuite pouvoir la transformer en exercice. L'impulsion naturelle est une base qu'il faut toujours préserver, on ne doit jamais pomper dans cette ressource pour travailler, cela reviendrait à "dédresser" mot qu'une écuyère du Cadre Noir a prononcé il y a peu lors d'une discussion après un stage que j'ai eu la chance de faire avec elle.

Pour en finir avec l'épaule en dedans, il faut ensuite garder une bonne tension sur la rêne extérieure en gardant un angle correct, pas de tête tordue surtout et maintenir l'impulsion avec la jambe intérieure et l'assiette dans le sens du déplacement, enfin, tenir les hanches si besoin. Quelques foulées suffisent car on ne cherche pas la perfection, on cherche la compréhension. La jument doit juste comprendre comment utiliser son corps pour travailler dans le bon sens : tenir ses épaules, tenir ses hanches, continuer de pousser, rester dans l'axe, tendre son dos, chercher le contact avec la main du cavalier. Parfois on n'a pas tout en même temps, mais il est important de récompenser dès qu'on obtient une "composante" de plus, en essayant de ne pas perdre celles déjà acquises évidemment.

Lorsque la jument se relâche et que le contact devient plus moelleux tout en conservant la qualité de l'exercice c'est qu'on est vraiment très proche de ce que l'on cherchait.

Voilà, aujourd'hui nous en sommes au reculer car la cavalière avait envie que je travaille cela avec la jument, nous avons donc d'abord attaqué par de bons arrêts, car il n'y a pas de bon reculer sans bon arrêt cela va sans dire. Comme cela faisait un moment que je ne l'avais pas remontée, je l'ai d'abord remise un peu devant dans les transitions descendantes, elle avait de nouveau tendance à lâcher le dos. Une fois que j'ai obtenu de bons arrêts, droits, engagés et légers je lui ai demandé quelques pas de reculer. Evidemment, les premiers pas ont été plus que désordonnés, mais ce n'est pas grave, j'ai récompensé pour qu'elle comprenne que l'idée était la bonne, c'est à dire, se déplacer vers l'arrière.

Pour demander le reculer j'ai utilisé plusieurs choses, tout d'abord j'ai légèrement bloqué mes mains pour interdire le mouvement vers l'avant, j'ai changé l'orientation de mon buste et désengagé mon bassin puis j'ai demandé le mouvement avec mes jambes. L'orientation du buste est extrêmement importante, le fait d'engager le bassin, épaules derrière les hanches envoie le cheval vers l'avant. Le contraire a donc toutes les chances d'avoir l'effet inverse, et c'est bien le cas, voilà pourquoi il ne faut pas passer devant un cheval à l'abord d'un obstacle, cela éloigne le cheval de l'obstacle et l'on a donc toutes les chances de faire une belle georgette ou de provoquer le refus du cheval. Pour les matheux, il suffit de réfléchir en vecteurs de force, épaules derrières : la force pousse le cheval vers l'avant ; épaules devant : la force pousse le cheval vers l'arrière. Pas besoin d'exagérer hein, c'est très léger comme nuance !

La jument a d'abord beaucoup résisté sur la main en s'ouvrant beaucoup ce qui ne me dérange pas outre mesure, puis elle a ensuite désengagé l'arrière main en reculant ses pieds de manière totalement désordonnée. J'ai donc redemandé le mouvement en avant, un arrêt, puis de nouveau le reculer. Cette fois-ci elle a de nouveau beaucoup résisté devant mais n'a pas désengagé les postérieurs et elle a fait un pas de ce qui commençait à vraiment ressembler à du reculer. Nous avons répété quelques fois cela avec beaucoup de caresses dès qu'elle faisait un progrès, puis elle a fini par reculer deux pas sans résister et en conservant même une jolie mise en main avec un soupçon de relâchement. Nous sommes donc restées là dessus car c'était vraiment très satisfaisant pour une première leçon.

Prochaines séances : travail à l'obstacle sur un abord au trot pour développer le réflexe des antérieurs. La jument a fait son premier concours il y a quelques temps sur une bonne 1m, elle s'est vraiment super bien comportée surtout que c'était assez gros pour elle. J'étais vraiment contente mais elle a malheureusement fait deux petites fautes sur des abords un peu près par manque d'expérience. Nous allons donc essayer de l'aider à s'améliorer de ce côté là !